P Valéry écrit : « Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles; nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins, descendus au fond Inexplorable des siÚcles, avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs dictionnaires, leurs classiques. leurs
InterpellĂ©sur La Crise de lâEsprit et sa fameuse phrase initiale (« Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles » [ValĂ©ry, 1924 : 988]), lâauteur en appelle Ă la mĂ©fiance et Ă la circonspection concernant les affirmations sur lâhistoire et la civilisation, et finit par Ă©crire : « Câest un jeu ; ce nâest quâun jeu.
Nousautres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Paul ValĂ©ry Contexte historique : 1919 Paul VALĂRY (1871-1945), La Crise de lâesprit (1919). PremiĂšre Guerre mondiale, Ă©pilogue. Mot cĂ©lĂšbre et prophĂ©tique dâun intellectuel trĂšs
Vay Tiá»n Nhanh Chá» Cáș§n Cmnd. PENSER LE MONDE AU TEMPS DU CORONAVIRUS CHRONIQUE 1, LE 20 MARS 2020 MORTELLE CIVILISATION ! En ces temps obscurs et douloureux, de confinement quasi planĂ©taire, oĂč un flĂ©au dâune ampleur encore incommensurable sur le plan humain, tant du point de vue sanitaire que social ou psychologique sans mĂȘme parler de ses dĂ©sastreuses consĂ©quences Ă©conomiques, rĂ©pand la mort, angoisse et souffrance, aux quatre coins de nos cinq continents, et surtout en Europe aujourdâhui, il serait tentant, mais peut-ĂȘtre aussi trop facile, de paraphraser, en en dĂ©plaçant certes le contexte historique, la cĂ©lĂ©brissime premiĂšre phrase de Marx et Engels en leur non moins fameux Manifeste du Parti Communiste un spectre hante lâEurope le spectre du coronavirus ». Je ne mây adonnerai toutefois pas ici. Lâheure, en effet, est suffisamment grave, en cette deuxiĂšme dĂ©cennie du XXIe siĂšcle, et la situation suffisamment sĂ©rieuse, pour ne rien ajouter, face Ă cette prĂ©occupante pandĂ©mie du covid-19, au catastrophisme ambiant, Ă un alarmisme exagĂ©rĂ© ou Ă une quelconque et trĂšs malvenue thĂ©orie du complot, oĂč de nouveaux apprentis sorciers, idĂ©ologues de tous poils et autres prĂȘcheurs de mauvais aloi, font de leur prĂ©tendu savoir, mais bien plus encore de leur fonciĂšre ignorance, le lit aussi nausĂ©abond quâarrogant de leurs propres et seuls calculs politiques, souvent fanatisĂ©s. Honte Ă ces sinistres dĂ©magogues qui exploitent ainsi sans vergogne, sur de misĂ©rables vidĂ©os quâils essaiment Ă lâenvi sur les diffĂ©rents rĂ©seaux sociaux, lâactuelle dĂ©tresse humaine ! Câest donc Ă un immense poĂšte, philosophe Ă ses heures intelligemment perdues â le grand Paul ValĂ©ry â, que je ferai appel ici, plus modestement, afin dâĂ©clairer quelque peu, certes humblement mais plus sagement aussi, cette sombre et funeste plaie du temps prĂ©sent. LA CRISE DE LâESPRIT Il y a tout juste un peu plus dâun siĂšcle, en 1918, au lendemain donc de la PremiĂšre Guerre mondiale mais le prĂ©sident de la RĂ©publique Française, Emmanuel Macron en personne, ne vient-il pas de marteler que, face Ă cet ennemi invisible et insaisissable » quâest ce menaçant coronavirus, nous Ă©tions prĂ©cisĂ©ment en guerre » ?, ValĂ©ry Ă©crivait, en effet, un texte mĂ©morable, dâune extraordinaire profondeur dâĂąme et dont lâemblĂ©matique titre, La Crise de lâEsprit », devrait plus que jamais rĂ©sonner, aujourdâhui, comme un pressant quoique salutaire cri dâalarme, Ă mĂ©diter toutes affaires cessantes, au vu de cette urgence simplement mĂ©dicale, pour lâavenir, sinon la sauvegarde, de lâhumanitĂ©. Ainsi donc ValĂ©ry commençait-il dĂ©jĂ Ă lâĂ©poque, dâune formule dont la concision nâavait dâĂ©gale que sa justesse, son admirable mĂ©ditation Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. » Et de justifier ensuite, avec force dĂ©tails et preuves Ă lâappui, quoique sans pour autant jamais tomber en un nihilisme tout aussi dĂ©sespĂ©rant, voire suspect, cette douloureuse mais lucide assertion Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, dâempires coulĂ©s Ă pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siĂšcles avec leurs dieux et leur lois, leurs acadĂ©mies et leurs sciences pures et appliquĂ©es, avec leurs grammaires, leurs dictionnaires, leurs classiques, leurs romantiques et leurs symbolistes, leurs critiques et les critiques de leurs critiques. Nous savions bien que toute la terre apparente est faite de cendres, que la cendre signifie quelque chose. Nous apercevions Ă travers lâĂ©paisseur de lâhistoire, les fantĂŽmes dâimmenses navires qui furent chargĂ©s de richesse et dâesprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces naufrages, aprĂšs tout, nâĂ©taient pas notre affaire. Elam, Ninive, Babylone Ă©taient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avaient aussi peu de signification pour nous que leur existence mĂȘme. Mais France, Angleterre, Russie⊠ce seraient aussi de beaux noms. ⊠Et nous voyons maintenant que lâabĂźme de lâhistoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons quâune civilisation a la mĂȘme fragilitĂ© quâune vie. Les circonstances qui enverraient les Ćuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les Ćuvres de MĂ©nandre ne sont plus du tout inconcevables elles sont dans les journaux. » UNE CIVILISATION A LA MĂME FRAGILITE QUâUNE VIE ValĂ©ry, oui, a, hĂ©las, raison Ă lâheure oĂč lâhumanitĂ© se voit aujourdâhui menacĂ©e trĂšs concrĂštement, pour reprendre les termes mĂȘmes des principaux responsables de lâOMS Organisation Mondiale de la SantĂ© aussi bien que de lâONU Organisation des Nations-Unies, et face Ă laquelle le nouveau coronavirus nâest assurĂ©ment que le symptĂŽme Ă la fois le plus spectaculaire, vaste et dangereux, nous sentons quâune civilisation a la mĂȘme fragilitĂ© quâune vie ! Car cette humanitĂ©, effectivement, est aujourdâhui comme assiĂ©gĂ©e de toutes parts rĂ©chauffement climatique ; pollution atmosphĂ©rique ; destruction de lâĂ©cosystĂšme ; rĂ©trĂ©cissement du biotope ; Ă©rosion des glaciers ; fonte des neiges ; Ă©lĂ©vation des ocĂ©ans ; inondations et tsunamis ; cyclones et tremblements de terre ; disparition dâespĂšces animales ; Ă©touffement de la faune vĂ©gĂ©tale et marine ; apparition de maladies inconnues et de nouvelles pathologies ; Ă©pidĂ©mies incontrĂŽlables ; augmentation des dĂ©pressions nerveuses, des burn out et des suicides ; multiplication des guerres locales ou tribales ; propagation du terrorisme islamiste ; retour de lâobscurantisme religieux ; montĂ©e des extrĂ©mismes et autres populismes ; migrations gigantesques ; dĂ©placements de populations ; pauvretĂ© grandissante ; crash boursiers ; robotisation de lâhumain, voire du post-humain ; emballement du capitalisme sauvage ; triomphe de lâargent ; soif de compĂ©tition mal comprise ; mĂ©pris de la culture au profit du happening ; dĂ©perdition de la langue comme de lâĂ©crit ; nĂ©gation du rĂ©el au profit du virtuel ; Ă©mergence de la pensĂ©e unique au dĂ©triment de la rĂ©flexion critique ; rĂšgne de lâeffet de mode ; empire du conformisme ambiant ; valorisation du matĂ©rialisme et dĂ©valorisation du spirituel ; course folle Ă lâarmement ; perte de tout point de repĂšre pour une jeunesse en mal dâidĂ©aux ; dĂ©prĂ©ciation des valeurs morales, du sens de lâĂ©thique et des comportements civiques, toutes choses pourtant essentielles Ă la bonne marche du monde ; aveuglement de masse ⊠Et jâen passe les tares de notre pseudo modernitĂ© sont trop nombreuses pour que je puisse les Ă©numĂ©rer toutes ici ! LA NATURE, A DEFAUT DE CĆUR, A SES RAISONS QUE LA RAISON NE CONNAĂT PAS Ainsi donc, oui, Paul ValĂ©ry, esprit fin, cultivĂ©, profond et subtil Ă la fois, a raison notre civilisation, nous le constatons Ă prĂ©sent de maniĂšre on en peut plus tangible avec cette dramatique crise du coronavirus, est, elle aussi, mortelle ! A cette Ă©norme diffĂ©rence prĂšs quâelle sâavĂšre aujourdâhui doublement mortelle mortelle au sens passif â elle se meurt, inexorablement, et par notre propre faute â mais aussi au sens actif â elle est en train, littĂ©ralement, de nous tuer, en une soudaine accĂ©lĂ©ration exponentielle, et toujours par notre propre faute, ce mixte inconsidĂ©rĂ© dâinconscience, dâimprĂ©vision et dâĂ©goĂŻsme, de piĂštres calculs Ă toujours Ă trop courts termes, sans visions dâensemble, aiguillonnĂ©e par le seul intĂ©rĂȘt particulier au dĂ©triment de lâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Oui, le monde contemporain a les idĂ©es courbes plus encore que courtes voilĂ pourquoi, dĂ©sormais, il ne tourne plus rond quâen apparence. Pis il se veut tellement rĂ©glĂ©, formatĂ©, normatif, telle une parfaite machine Ă fabriquer un totalitarisme qui sâignore, un fascisme qui ne dit pas son nom, quâil a fini, au comble dâun paradoxe aussi vertigineux que comprĂ©hensible, par se dĂ©rĂ©gler, sans plus de limites pour le contenir dans la sphĂšre de la raison, du simple bon sens. Nous en payons aujourdâhui, prĂ©cisĂ©ment, le lourd et tragique tribut ! Le systĂšme, en ces temps aux rumeurs dâapocalypse, est, manifestement, Ă bout de souffle un minuscule mais surpuissant virus peut anĂ©antir, ou presque, sinon une civilisation tout entiĂšre, du moins lâarrogance des hommes ! Terrible et fatidique boomerang ! La technologie, fĂ»t-elle la plus sophistiquĂ©e, nây peut rien la nature, Ă dĂ©faut du cĆur, a ses raisons que la raison ne connaĂźt pas ! IL FAUT TENTER DE VIVRE ! DâoĂč, urgente, cette conclusion en forme de priĂšre lâĂȘtre humain, sâil ne veut pas vĂ©ritablement disparaĂźtre, saura-t-il enfin prendre Ă sa juste mesure, en y rĂ©flĂ©chissant doctement, avec la sagesse dont il est encore capable, les impĂ©rieuses, et surtout vitales, leçons de cette tragique, sinon encore fatale, histoire ? Câest lĂ un souhait que jâexprime ici trĂšs sincĂšrement, nanti de lâindĂ©fectible soutien moral et intellectuel, lĂ encore, du grand Paul ValĂ©ry dans les derniers vers de cette splendide mĂ©ditation, quasi mĂ©taphysique, sur la mort quâest son CimetiĂšre Marin », lâun des plus beaux poĂšmes, au sein de la littĂ©rature française, du XXe siĂšcle Le vent se lĂšve !... Il faut tenter de vivre ! » Allez, courage, hommes et femmes de bonne volontĂ© la guerre, malgrĂ© lâimmense souffrance de ce monde aujourdâhui endeuillĂ©, et par-delĂ mĂȘme ce douloureux avertissement qui nous Ă©treint quotidiennement, nâest pas perdue ! DANIEL SALVATORE SCHIFFER* *Philosophe, auteur, notamment, de La Philosophie dâEmmanuel Levinas â MĂ©taphysique, esthĂ©tique, Ă©thique » Presses Universitaires de France, Oscar Wilde » et Lord Byron publiĂ©s tous deux chez Gallimard â Folio Biographies, TraitĂ© de la mort sublime â Lâart de mourir de Socrate Ă David Bowie Alma Editeur, Divin Vinci â LĂ©onard de Vinci, lâAnge incarnĂ© » et Gratia Mundi â RaphaĂ«l, la GrĂące de lâArt » publiĂ©s tous deux aux Editions Erick Bonnier.
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These two letters were first published in English in the London weekly AthenĂŠus, nr. 4641, April 11, 1919 and nr. 4644, May 2, 1919. Texte reproduit d'aprĂšs Paul VALĂRY, Ćuvres I, Ă©dition Ă©tablie et annotĂ©e par Jean Hytier, Paris, Gallimard 1957, collection "La PlĂ©iade", pp. 988-1014. - Blog Paul ValĂ©ry VARIĂTĂ ESSAIS QUASI POLITIQUES LA CRISE DE L'ESPRIT PREMIĂRE LETTRE Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulĂ©s Ă pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins; descendus au fond inexplorable des siĂšcles avec leurs dieux et leurs lois, leurs acadĂ©mies et leurs sciences pures et appliquĂ©es, avec leurs grammaires, leurs dictionnaires, leurs classiques, leurs romantiques et leurs symbolistes, leurs critiques et les critiques de leurs critiques. Nous savions bien que toute la terre apparente est faite de cendres, que la cendre signifie quelque chose. Nous apercevions Ă travers l'Ă©paisseur de l'histoire, les fantĂŽmes d'immenses navires qui furent chargĂ©s de richesse et d'esprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces naufrages, aprĂšs tout, n'Ă©taient pas notre affaire. Ălam, Ninive, Babylone Ă©taient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi peu de signification pour nous que leur existence mĂȘme. Mais France, Angleterre, Russie... ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et nous voyons maintenant que l'abĂźme de l'histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu'une civilisation a la mĂȘme fragilitĂ© qu'une vie. Les circonstances qui enverraient les ouvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les Ćuvres de MĂ©nandre ne sont plus du tout inconcevables elles sont dans les journaux. Cf. Cicero, I have spared no pains to make myself master of the Greek language and learning Schiller, A glorious humanity Hugo, In a grand parliament of intelligence Emerson, When the Gods come among men - Disclosing in every fact a germ of expansion Ortega y Gassett, The birth of the city Aeschylus, Nobody's slaves Plato, Tyranny and slavery Gennadius Scholarius, Words are the fathers of all Good Pope Benedict XVI, The Papal Science Learned Freeware Enable Desktop Gadgets on Windows 10 or 11 Search ALL Desktop Gadget Font viewers, to browse, test, install and uninstall your fonts Daily Reading Gadget Greek Clock desktop gadget More Amazon Search Gadget Bible Reader Old Standard and Didot Unicode Greek Polytonic Fonts Menologion Inspirational Desktop Gadget More
nous autres civilisations nous savons maintenant que nous sommes mortelles